M. Périlleux, président de la CRD, intervient au Lab Midi sur les dynamiques des fonctions urbaines
Le 18 novembre, le Lab Midi "Comment ça fonctionne ?" de perspective.brussels, était dédié à l'analyse des dynamiques des fonctions urbaines et leur impact sur l'urbanisme.
Cet événement a réuni des experts tels que Benoît Périlleux, président de la CRD, ainsi que Louis de Grady et Marion Pourbaix, géographes analystes, et Mathilde Berlanger, Coordinatrice Share the City de Perspective pour une réflexion approfondie sur les transformations récentes et les enjeux futurs des fonctions urbaines.
Benoît Périlleux a tout d’abord mené une réflexion sur les fonctions urbaines et leur impact immobilier (voir la présentation ci-jointe).
Il a démontré qu’il est impossible de séparer l’analyse des fonctions urbaines de leur impact sur le marché immobilier. Les plans réglementaires comme le PRAS ont pour objet une forme de régulation par les pouvoirs publics du marché : en l’absence de règles, seules les fonctions fortes pouvant supporter un coût élevé du foncier seront dominantes. A titre d’exemple, il cite la différence entre les activités productives qui dans la zone du canal, supportent une imputation foncière au m² bâti de maximum 250 € et le logement qui dans la même zone permet une imputation foncière de plus de 750 €/m². L’Observatoire des fonctions urbaines joue un rôle essentiel en fournissant des outils pour comprendre et anticiper les dynamiques en jeu. Cette réflexion est d’autant plus cruciale dans un contexte urbain comme celui de Bruxelles, marqué par une longue évolution historique et des cadres réglementaires spécifiques.
Il a ainsi évoqué l'histoire de la planification à Bruxelles :
Au début du XXe siècle, les plans de développement de la ville ne prévoyaient pas de règles concernant les affectations, mais Bruxelles était structurée par un parcellaire qui allait déterminer les affectations possibles : dans les quartiers résidentiels, la largeur des parcelles se situait entre 6 et 8 mètres, tandis que dans les quartiers mixtes de la zone du canal, il y avait de grandes parcelles pouvant accueillir des industries. À cette époque, ce sont les grands équipements (comme les gares, les marchés ou les infrastructures publiques) qui ont principalement façonné l’organisation de la ville et ses usages.
L’arrêté de 1972 relatif à la mise en œuvre des plans de secteurs a introduit un glossaire pour définir et encadrer les fonctions urbaines. Toutefois, l’application de ces règles a parfois donné lieu à des dérives, souvent en raison de pressions ou d’intérêts locaux. Ces dérapages illustrent les tensions existant entre planification et enjeux locaux.
Avec la création de la Région de Bruxelles-Capitale, une nouvelle dynamique a émergé pour analyser et planifier le territoire. Les premières études ont été consacrées aux zones de bureaux, reflétant leur importance stratégique pour l’économie et l’aménagement urbain de la région, et la nécessité de protéger les zones de logements du grignotage par la fonction bureau.
En conclusion, l’histoire urbaine de Bruxelles met en lumière des opportunités manquées et des leçons essentielles pour les réflexions actuelles. L’échelle des analyses doit également être prise en compte, car elle influence directement la pertinence des stratégies d’aménagement. Une compréhension fine des erreurs passées et des évolutions réglementaires est cruciale pour élaborer des solutions adaptées aux besoins contemporains et pour aligner les fonctions urbaines avec les objectifs immobiliers et sociétaux.
Marion Pourbaix et Louis de Grady ont ensuite présenté l’observatoire des fonction urbaines, expliquant la dynamique actuelle des fonctions urbaines à Bruxelles afin de comprendre comment elles évoluent et s'organisent dans l'espace. L'analyse se concentre sur les fonctions autorisées entre 2018 et 2021, en lien avec les prescriptions du Plan Régional d'Affectation du Sol (PRAS). Cela inclut une évaluation de leur répartition, afin de déterminer si elles sont équitablement réparties sur le territoire et d'identifier les zones du PRAS où elles se concentrent. L'objectif est également d'observer quelles fonctions connaissent une expansion et lesquelles sont en déclin. Enfin, cette analyse vise à fournir une vision globale de la dynamique immobilière actuelle et future, afin de soutenir les outils de planification dans l'atteinte des objectifs régionaux. L’analyse des dynamiques relatives des fonctions selon les zones du PRAS montre que le logement est dominant partout où il est autorisable. Les équipements sont la 2e fonction ayant un bilan positif dans toutes les zones. Par contre , le bureau et les activités productives ont un bilan négatif. L’analyse croisée par secteurs statistiques montre par exemple que lorsque l'on compare logement et activités productives, la plupart des secteurs indiquent une diminution des activités productives combinée à une augmentation du logement. L’observatoire conclut en insistant sur la nécessaire protection des fonctions en perte de vitesse comme les activités productives, pourtant considérées comme nécessaires pour un territoire logistiquement fonctionnel et pourvoyeur d’emplois diversifiés.
Enfin, Share the city a été présenté par Mathilde Berlanger : le PRAS constitue un outil fondamental pour assurer une mixité fonctionnelle dans l’espace urbain. Il invite à interroger les fonctions en lien avec leurs usages, dans une logique qui vise à comprendre et optimiser leur rôle dans le contexte actuel.
Si les systèmes urbains ont bien fonctionné depuis plus de 100 ans, les villes d’aujourd’hui se caractérisent par une diversité accrue de fonctions et de populations. Cela nécessite de repenser les usages dans la ville, non seulement pour répondre aux besoins contemporains, mais aussi pour créer des dynamiques de survie et de régénération. Ces mécanismes permettent aux sociétés de s’organiser de manière plus durable et résiliente.
Le PRAS reflète historiquement une tendance à l’expansion urbaine. Cependant, l’un de ses grands défis actuels est de passer d’une logique d’extension à une logique de renouvellement urbain. Cela implique de limiter l’étalement du bâti tout en intégrant une priorité croissante à la compréhension des fonctions du vivant dans l’espace urbain.
L’espace urbain est également perçu comme tridimensionnel, ce qui nécessite une approche intégrant les dimensions horizontale et verticale. En parallèle, le PRAS met en lumière l’évolution du stock immobilier et le dynamisme du marché immobilier, des éléments essentiels pour comprendre les transformations en cours (par exemple la RTBF).
En conclusion, le PRAS est un levier stratégique pour guider la transition de la ville vers une meilleure intégration des fonctions, un développement plus équilibré et un aménagement orienté vers le renouvellement et la durabilité.